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Portraits

Haussmann au petit matin, carrefour incontournable sur la route de la rentrée

Associé depuis toujours aux grands magasins et à une certaine idée du chic « à la française », le quartier Haussmann est aussi un endroit où se croisent toutes sortes de Parisiens. Occupés, pressés, masqués, en cette rentrée 2020 pas tout à fait comme les autres.

Après un été perturbé par l’épidémie de Covid-19, les Parisiens ont pu se consoler avec un mois de septembre particulièrement doux. Mais les vacances sont déjà loin pour ce lycéen au pas traînant, cette femme en tailleur qui presse le pas ou ces têtes blondes qu’on emmène à l’école en les tirant gentiment par le bras… Même chose pour cet agent de propreté de la ville de Paris, et sa drôle de machine aux airs d’éléphant en plastique. Tous sont masqués, mais la vie a repris. 

 

 

Cafés au comptoir, quotidiens gratuits et magie du cinéma
À l’heure où Paris finit de s’éveiller, lorsque le métro mène au boulot et que le dodo est un souvenir regretté ou un objectif inavouable, le piéton pressé ne s’arrête au maximum que quelques secondes, pour tendre le bras et attraper un exemplaire du quotidien gratuit 20 Minutes. Il est distribué ce matin-là par Stéphanie, en place de 8h à 10h au croisement rue de la Fayette / Boulevard Haussmann. Si ces gens occupés veulent prendre le temps de se croiser, ils peuvent toujours pousser la porte du Sofa Café, Boulevard Haussmann. Deux collègues en chino/polo discutent ainsi au comptoir, masques sur le menton, cafés sous le nez. Ils sont rejoints par Terence, calorifugeur en t-shirt/baskets, et l’on se salue poliment, sans lier connaissance. Derrière son comptoir, le taulier garde le sourire malgré un contexte difficile : « avec la généralisation du télé-travail, on a 3 à 4 fois moins de monde que d’habitude ! On avance à tâtons, parce que ça fluctue beaucoup d’une journée à l’autre. Mais le matin de toute façon, ça a toujours servi à préparer le rush du déjeuner : on fait du ménage, de la mise en place, on réceptionne les livraisons… » L’homme au veston noir sert un autre Espresso et Terence remet son masque sur le nez pour commencer les travaux sur un restaurant qui devrait servir ses premiers plats avant la fin de l’année. Sur la route, il croisera peut-être l’équipe de cinéma qui s’affaire auprès de Franck Dubosc sur un trottoir de la rue du Havre. Affublé d’un ensemble cuir vintage et perché sur des bottines à talonnettes, Dubosc y tourne Rumba la vie, son prochain film, attendu sur les écrans en 2021. Une fois la séquence dans la boîte, les barrières et les caméras disparaissent en une grosse poignée de secondes pour laisser les piétons reprendre possession du trottoir. Et la vie suit son cours, toujours. 

 

 

 

 

Les Grands Magasins comme une ruche et leurs milliers d’abeilles
« Ce qu’on vend le plus le matin, c’est des viennoiseries… Pains au chocolat, croissants, les classiques Parisiens, quoi ! » Dida Kaoudj est vendeuse à la Boulangerie-Pâtisserie Le Grand Opéra, à l’angle de la rue de Provence et de la rue de Mogador. Le Grand Opéra a ouvert ses portes en 1900, à en croire le store vert de la devanture, et ce matin, la boulangerie qui fait aussi brasserie le midi a relevé le store à 6h30, comme tous les matins de la semaine. « On a souvent les ouvriers des Galeries qui attendent l’ouverture », précise Dida. À quelques mètres de là, plusieurs électriciens des Galeries Lafayette profitent d’une pause cigarette pour mettre leurs masques sur le menton. Leur journée a effectivement commencé à 7h du matin et finira à 15h30, pour ne pas déranger la clientèle du magasin. Le quartier Haussmann est un quartier vivant, hyperactif, où chacun vaque à ses occupations, mais le pouvoir d’attraction des grands magasins leur donne une place centrale dans la vie de leurs voisins. Vahid, kiosquier sur le Boulevard Haussmann, ne raconte pas autre chose : « pour nous c’est très calme jusqu’à 11h et l’ouverture des Galeries, puisqu’elles ouvrent désormais à cette heure-là et plus à 10h comme avant ». Son kiosque, il l’ouvre tout de même à 9h30 et jusqu’à 20h, pour satisfaire les derniers lecteurs de presse écrite sur le chemin du boulot ou du dodo. Étudiant en architecture iranien dont le sourire semble traverser le masque, Vahid est employé de ce kiosque depuis 3 ans et profite des périodes creuses de la journée pour feuilleter les magazines d’architecture, forcément, qui trônent dans les travées supérieures de son étalage. 

 

 

 

Et si le chic à la française était bien une affaire de parfums ?
Si le nom de Haussmann est associé, un peu partout dans le monde, à une certaine idée de l’élégance et du chic à la Française, comment est-ce que le quartier fait honneur à sa réputation dès le saut du lit ? « Les gens viennent beaucoup le matin, observe Lucie, vendeuse à la boutique Sephora du boulevard Haussmann, ne serait-ce que pour se parfumer, avec les flacons disponibles en rayon… » La jeune femme s’en amuse et rappelle ainsi qu’à Paris, le chic doit aussi s’accommoder des contraintes de la vie active, loin des images figées imposées par la publicité. Clara Cheneau, elle, entre en troisième année d’une double licence Économie/Géographie et fait des sondages dans la rue pour se faire un peu d’argent de poche. 5 bonnes minutes avec les passantes âgées de 18 à 35 ans qui daignent s’arrêter, et à qui elle fait sentir 3 parfums différents avant de dérouler un court questionnaire. Postée sur la partie piétonne de la Rue Caumartin, entre le Passage du Havre et les Grands Magasins, elle n’est pas seule à profiter du flux constant de piétons. « Il y a pas mal de gens qui font le même genre de sondages, mais aussi ceux qui lèvent des fonds pour des ONG comme Amnesty International ou Acted… Et le lundi, il y a ceux qui font goûter des chips ! » Elle en rigole avec une de ses collègues et reprend : « Les gens sont souvent pressés le matin parce qu’ils bossent, alors qu’ils ont plus de temps l’après-midi : en général, on arrive à trouver entre 15 et 20 personnes qui répondent chaque jour ». De quoi nourrir une définition du chic toujours mouvante ? Dans un haussement d’épaule, Clara l’espère bien. 

 

 

 

Il sera 11h dans quelques minutes et une petite foule s’est amassée devant l’entrée des Galeries Lafayette, à l’angle Lafayette/Haussmann. Ils guettent l’ouverture des portes et, malgré les masques, les horaires aménagés ou la chaleur de l’été indien, la journée va enfin pouvoir commencer !
 

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