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Patrimoine

Des Grenouilles aux Grands Magasins : la création du quartier Haussmann

  • Hôtel de la Victoire, propriété de Napoléon Bonaparte de 1798 à 1806 (démoli en 1857), 58 rue de la Victoire (ancienne rue Chantereine), Paris IXe

  • "Chaussée d'Antin, 15 et boulevard Haussmann 40 et 42". Second Empire (1852-1870).

  • Paris IXe. L'Opéra en fin de construction. 1872.

Encore relativement champêtre dans la première moitié du XIXe siècle, le quartier Haussmann s’est modernisé sous l’impulsion du baron Georges Eugène Haussmann, ce qui lui a valu son nom. 

Une tenue décontractée, d’élégantes petites lunettes rondes en écaille posées sur le nez, dénotent l’allure d’un homme à la soixantaine fringante : Michel Guët, qui reçoit dans un café tranquille de la rue des Martyrs dans le 9e arrondissement. Baptisé à Notre-Dame-de-Lorette, c’est dans ce quartier parisien qu’il est né et qu’il a consacré sa vie en faisant carrière aux Affaires Scolaires et Sociales de la Ville de Paris. Aujourd’hui à la retraite, il propose des balades/découvertes sur demande puisqu’il est notamment l’auteur d’un guide, Flânerie dans le 9e arrondissement (disponible sur demande à la Mairie du 9e). Lorsque cet homme fait référence à la naissance du quartier Haussmann dans la décennie de 1880, il dit « les années 80 » comme s’il y était.   

 

Haussmann avant Haussmann ? Les « folies » et les grenouilles

 

Les premiers grands travaux de modernisation de la capitale sont menés par Claude-Philibert Barthelot de Rambuteau, préfet de la Seine de 1833 à 1848, qui promet au roi Louis-Philippe de « donner aux parisiens de l’eau, de l’air et de l’ombre ». Lorsque le Second Empire est instauré en 1852, l’empereur Napoléon III souhaite poursuivre ces travaux pour éviter la propagation des feux, des épidémies ou des insurrections. Et pour continuer l’agrandissement de la ville, selon Michel Guët : « Avant les grands travaux, ce qui deviendrait le quartier Haussmann était encore très peu construit, semi-campagnard. Il y avait quelques « Folies », ces résidences bucoliques chères aux aristocrates, mais c’est à peu près tout. C’était peu construit parce que c’était une zone marécageuse, et il a d’ailleurs fallu construire l’église Notre-Dame-de-Lorette ou l’Opéra Garnier sur pilotis ». Afin d’étayer son propos, rappelons que la Rue de la Victoire s’est longtemps appelée Rue Chantereine en référence aux coassements des grenouilles reinettes dans le coin.

 

Des travaux nécessaires sans être dénués d’arrière pensée politique

 

Le baron Georges Eugène Haussmann alors préfet de Paris se voit confier les travaux. Etant haut fonctionnaire aux brillants états de service, il s’entoure des plus grands de l’époque avec les ingénieurs Eugène Belgrand et Adolphe Alphand, et les architectes Gabriel Davioud et Jean Camille Formigé. Leurs tâchent sont multiples puisqu’ils sont chargés de percer de nouvelles voies, de mettre en place un système d’égouts (dont la capitale avait encore bien besoin), et de réaliser des espaces verts. « Il fallait améliorer l’hygiène publique, concède le « Guide Patrimoine » de la Mairie du 9e, mais il y a aussi une arrière pensée politique, parce que les soulèvements de 1830 et 1848 sont passés par là et qu’on a bien compris qu’une nouvelle voirie peut éviter la mise en place de barricades ».

 

Haussmann, un haut fonctionnaire un brin sentimental ?

 

Alors que lui et ses équipes transforment la capitale, Haussmann feint la modestie auprès de l’empereur afin que son nom ne soit pas associé à ce que l’on appelle aujourd’hui le Boulevard Saint-Michel, rive gauche. Pourquoi cette humilité ? « Haussmann a dû faire détruire sa maison natale pendant les travaux, note Michel Guët, tout près du Boulevard qui finira par porter son nom. Évidemment qu’il est lié au quartier : ses obsèques se dérouleront à l’église Luthérienne de la rue Chauchat en janvier 1891 ». À sa mort, le Printemps s’est déjà installé sur le boulevard et les Galeries Lafayette ouvriront bientôt, associant définitivement le nom d’Haussmann au chic des grands magasins.

 

« Avec les travaux d’Haussmann, conclut Guët, on met en place une scénographie urbaine qui sollicite l’œil et l’attention des gens de façon calculée : rien n’est dû au hasard. Les grands magasins qui se sont installés boulevard Haussmann ont profité de cette mise en scène : de la voie qui traverse Paris d’Ouest en Est, de la proximité de bâtiments prestigieux comme l’opéra Garnier ». Si Michel Guët peste parfois contre une mémoire qu’il prétend défaillante, il semble toutefois que la mémoire du quartier soit entre de bonnes mains.

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